Koen Naert, ce héros volé?

Souvenez-vous... Cela n'était plus arrivé depuis 1971 et cette médaille d'or de Karel Lismont grâce à un marathon d'Helsinki couru en 2H13'09". Quelques 47 années plus tard, le 12 août 2018, Koen Naert arborait fièrement le drapeau belge et se laissait emporter par ses émotions. Le Roularien venait d'écrire une des plus belles pages de l'histoire de notre athlétisme. Un récit fantastique dont il est l'unique héro. En effet, il venait de créer la surprise en devenant le nouveau champion d'Europe de marathon à Berlin via un magnifique chrono de 2H09'51", soit son nouveau record personnel sur la distance. Ce belge pure souche devançait le suisse d'origine érythréenne, Tadesse Abraham, et l'italo-marocain, Yassine Rachik. C'était l'apothéose d'une saison 2018 qui avait plutôt bien démarré avec une 22ème place au championnat du monde de semi-marathon de Valence en mars, 3ème européen. Il signait également un nouveau record personnel de 1H01'42", soit la meilleure performance belge de l'année et la cinquième meilleure performance belge de tous les temps. Il faut savoir qu'il ne remplissait même pas les critères de sélection de notre chère fédération belge qui avait fixé des minimas à 1H02'20". Pour vous donner une idée, lors de cette compétition internationale, seuls 32 coureurs sur plus de 150 sont arrivés à réaliser une telle performance... En plus de nos problèmes liés aux infrastructures, ne devrait-on pas croire davantage en nos athlètes? Ils ne se battent pas qu'avec leurs armes, ils se battent aussi avec le cœur et c'est ça qui fait notre différence, notre principale force. Lors de grands évènements, l'histoire nous a déjà démontré à maintes reprises notre capacité à se surpasser. Et si on offrait plus d'opportunités à nos sportifs de faire le plein d'expérience? Bref, on s'éloigne du sujet...

KOEN NAERT VICTIME DE LA POPULARITÉ DU FOOT ?

Koen Naert, c'est ce bonhomme qui nous faisait déjà rêver en 2017 lorsqu'il parcourait l'avenue principale de New-York en tant que meneur d'allure devant quelques kenyans. Il est ce champion d’Europe de marathon 2018 qui ne parvient même pas à vivre du salaire qu'on lui offre en Belgique. C'est cet athlète qui combinait encore il y a peu sa vie de coureur avec sa vie professionnelle, lui qui était infirmier dans un hôpital militaire à Neder-over-Hembeek. Ses sacrifices pour arriver à un tel niveau sont donc considérables. Et il l'avouait lui même pour le site 7sur7 : « Les sacrifices pèsent parfois très lourd. Par exemple, je suis très rarement aux fêtes de famille. Je ne vis pas une vie normale. En plus, l'incertitude est grande. Le choix de tout miser sur votre sport pendant un an n'est pas facile. Surtout si vous vivez seul ou que vous êtes mariés, ce qui est mon cas. Et vous ne pouvez pas vivre d'un salaire. C'est malheureusement la dure réalité ».

Un fossé abyssal sépare notre plat pays et les autres nations en ce qui concerne l'athlétisme. Pourquoi ne pas gâter nos talents ou en tout cas leurs permettre au moins de bosser correctement afin qu'ils puissent aller le plus loin possible? L'homme de 29 ans a même confié que ses homologues, américains notamment, se moquaient régulièrement de lui lorsque l'on évoquait la différence des rémunérations. Par conséquent, pour un tas de raisons regrettables, si un belge souhaite être compétitif au plus haut niveau, il doit être deux fois plus déterminé que les autres, deux fois plus brave et faire deux fois plus de sacrifices. Pourtant, Koen Naert est parvenu à déjouer les pronostiques et à monter sur le trône européen. C'est un véritable tour de force qu'a réalisé ce garçon lors de ces championnats. Malgré la belle campagne des diables rouges lors de la Coupe du Monde 2018, nous nous attendions donc à voir Koen être justement récompensé lors de la cérémonie du sportif belge de l'année. Stupeur lorsque l'on apprenait que c'est Eden Hazard qui raflait le titre. Était-ce un lot de consolation pour le joueur de Chelsea qui s'attendait probablement à être élu meilleur joueur du mondial? Nous, coureurs, faisons nous preuve d'un manque d'objectivité? Quoi qu'il en soit, c'est un petit sentiment d'injustice qui s'est emparé de nous à l'annonce de cette nouvelle.

Pourquoi? Parce que lorsque Eden Hazard mange un hamburger avec des frites après son match, Koen Naert est probablement entrain de jouer avec sa balance afin de ne pas avoir une pâte de trop dans son assiette. Parce que Koen s'entraîne plusieurs fois par jour et doit démontrer énormément de bravoure pour surpasser les obstacles qui se dressent devant lui tandis que ses adversaires étrangers bénéficient de tous les avantages imaginables afin d'être au top niveau. Parce que Eden Hazard a tout le loisir de ne se concentrer uniquement que sur son football contrairement à Koen... Oui Eden est un joueur de football extraordinaire qui nous fait vibrer mais ce que Koen Naert a réalisé en 2018... Eden Hazard avait encore quelques années devant lui pour remporter ce trophée.

Auteur de sacrifices importants à tous les niveaux, Koen Naert ne méritait-il pas plus qu'un autre ce titre du sportif belge de l'année 2018? Donnez votre avis...